A la découverte d’Asia Now, la foire d’art contemporain asiatique à Paris


20.Oct.2016

http://wandersofwonderingmind.com/thewoanderingmind/portfolio/asia-now-art-contemporain-asiatique

Cette semaine, Paris est en ébullition.

Du 18 au 24 octobre, la capitale accueille une multitude de foires d’art contemporain, de toutes les tailles et pour tous les goûts. Aujourd’hui, retour sur la première journée avec la découverte d’Asia Now, la foire dédiée à la création contemporaine asiatique qui fête cette année sa deuxième édition dans un nouveau lieu et deux fois plus de galeries que l’année précédente.

Rendez-vous est pris au 8 de l’Avenue Hoche pour découvrir la sélection des galeries qui exposent à Asia Now. Quartier huppé et art asiatique, les associations d’idées- voire purement les préjugés- vont déjà bon train à mesure que je dépasse les hôtels quatre étoiles et autres bureaux de haut standing de la rue. Une crainte : être assaillie par les œuvres de type pokémono-popesques des héritiers de Takashi Murakami et finalement succomber d’une crise d’épilepsie en technicolor avec pour dernier mot « l’art m’a tuer ». Bien fait pour moi : la flexibilité jouissive du cliché m’est revenue avec une souplesse égale à la figure. J’ai certes aperçu quelques œuvres d’un goût douteux enrobées d’un discours qui fonctionne toujours -après tout, c’est d’une foire dont on parle-, mais l’ensemble de la présentation est plutôt réjouissante.

De l’exposition à la curation

Première satisfaction est de constater que pour l’occasion, la majorité des galeries n’a pas cédé à la logique de juxtaposition propre au format de la foire d’art. Au contraire, nombres d’entre elles ont pris le parti d’un espace curaté, terme barbare qui désigne pourtant la merveille idée d’arranger une sélection d’oeuvres autour d’une idée ou d’un propos directeurs. Ainsi, la galerie Maga Danysz met en scène l’intérieur d’un collectionneur chinois où se rencontrent œuvres contemporaines et art premier. Du canapé, on peut observer le tableau/télévision d’un nouveau genre de l’artiste Lui Hongbo qu’il compose à partir d’écrans de smartphones cassés.

Dans l’étroit espace réservé à la galerie Leo Xu Projects, les artistes présentés réfléchissent autour de l’identité féminine et de sa construction contemporaine entre deux cultures, celle de leur pays et celle de la globalisation. Les petites sculptures de tissu en forme de pénis que Pixi Liao fait réaliser par son partenaire depuis 2013 confronte la répartition traditionnelle des travaux domestiques à l’idée d’une libération sexuelle des femmes.

Un lieu atypique

Il faut dire que l’espace de l’hôtel particulier de l’avenue Hoche se prête tout particulièrement à la création d’univers propres à chaque galerie. Là où la distribution aurait pu être un frein à l’appréhension générale comme ce fut récemment le cas pour la Biennale du Design de Londres, les dédales de l’hôtel particulier sont un atout. Comme dans un appartement où les pièces sont indépendantes mais liées, les propositions des artistes présentés par leur galerie entrent en résonance les unes avec les autres.

Li Rui, Double Faces, 2011- peinture à l'huile sur verre. Courtesy ifa gallery, Brussel, Shanghai. Photo: ©Delphine Lopez. Asia Now 2016

Li Rui, Double Faces, 2011- peinture à l’huile sur verre. Courtesy ifa gallery, Brussel, Shanghai. Photo: ©Delphine Lopez

 

Chez ifa galleryLi Rui peint des morceaux d’anatomie à l’intérieur de demi-sphères en verre. Joues, bouche, yeux, c’est un corps parcellaire et comprimé qui ne demande qu’à exploser que l’artiste met en scène. Les maillots de bain pour femme fait d’épingle à nourrice par Tayeba Lipi à la Sundaram Tagore Gallery ne disent pas autre chose. Le caractère étincelant de ces maillots-bijoux, parures pour le corps des femmes, éclipse à première vue la violence du rapport à la chair. Qu’elle brille et souffre en silence, plat comme le vide qui porte ces vêtements-tortures.

Des projets politiques

De l’adage – que j’invente pour l’occasion- « qui cherche une esthétique doit fuir la foire » et qui s’applique pour 99% de ces manifestations rutilantes du marché de l’art, Asia Now prend quelque distance. Le format à taille humaine de la seconde édition y est surement pour beaucoup, car l’œil reste attentif tout du long et découvre avec plaisir quelques nouveaux talents.

Pour News of the World, Pierre Coinde transforme son recoin de l’hôtel particulier en salle de visionnage de projets de jeunes vidéastes vietnamiens que la galerie a soutenu dans leur phase de production. La foire offre d’ailleurs une belle représentation à l’art vidéo. L’artiste Lee Wangqui représentera la Corée à la Biennale de Venise 2017 présente sur le stand de la galerie 313 Art Project deux film extraits de la série Made In à travers laquelle il interroge la place entre dépendance mutuelle et rejet unilatéral de la fabrique  artisanale au sein du système capitaliste libéral qui prône l’hyper productivité. Chez Magician SpaceQingmei Yao expose Recruter un mendiant/SDF pour une foire d’art contemporain, un projet performance réalisé pour la foire Art-O-Rama à Marseille en 2015. À la recherche d’un figurant pour jouer son propre rôle de mendiant pendant la tenue de la foire, Qingmei Yao déploie un théâtre du réel dont le geste artistique a pour seul garant- précaire- le contexte de l’art.